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Politique de l’énergie et du climat : la rentrée européenne

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Entre la mise en oeuvre du plan de relance verte et la poursuite du programme du Pacte vert pour l’Europe, la fin d’année 2020 et l’année qui va suivre s’annoncent chargées. Afin de pouvoir suivre le développement des travaux européens, EdEn propose un panorama de rentrée.

Les stratégies énergie-climat de la Commission européenne

Le plan de relance Next Generation Europe
En mai dernier, alors que la crise sanitaire semblait s’estomper mais que ses conséquences économiques se précisaient, la Commission européenne a présenté la stratégie de relance Next Generation Europe et un plan de financement massif de 750 milliards d’euros, dont 390 milliards d’euros de subventions publiques et 360 milliards de prêts garantis, pour construire la relance économique de l’Union européenne (UE) et des États membres.

Avec ce plan de relance, la Commission espère non seulement parvenir à remettre sur pied l’économie européenne mais aussi à favoriser son verdissement en fléchant 30 % des financements accordés vers des projets bénéfiques à l’action climatique.

Si l’objectif affiché et répété d’une transition verte est louable, sa réalisation concrète est loin d’être garantie. La question du statut du gaz en particulier fait débat : le Parlement européen s’est prononcé pour son inclusion dans le Fonds de transition juste, alors que son inclusion dans la « Facilité de relance et de résilience », le principal organe de financement du plan, est à l’heure actuelle toujours en question.

La stratégie sur l’intégration des systèmes énergétiques
En juillet dernier, la Commission européenne a présenté sa stratégie pour le secteur de l’énergie dans une communication intitulée Powering a climate- neutral economy: an EU Strategy for Energy System Integration.

Le premier pilier de cette stratégie est le principe Energy efficiency first. La Commission estime que l’amélioration de l’efficacité énergétique implique de comparer la performance des différentes formes d’énergies sur la totalité de leur cycle de vie. Dans cette perspective, la Commission semble vouloir attribuer un rôle clé au coefficient de conversion en énergie primaire (le PEF ou primary energy factor).

Le deuxième pilier de cette stratégie est l’électrification des usages, en particulier des secteurs du bâtiment et de la mobilité. La Commission prévoit que cette vague d’électrification sera portée par les énergies renouvelables dont elle estime que la part dans le mix électrique devrait atteindre 84 % d’ici à 2050.

Lire aussi : L’après COVID : la seconde révolution électrique doit être la base de la renaissance économique de l’Europe

Le rôle accordé à l’électrification est une évolution positive de la stratégie européenne mais le renforcement du principe d’efficacité énergétique qui serait exprimé en énergie primaire apparaît inquiétant pour le développement des formes d’électricité décarbonées non renouvelables comme le nucléaire. En misant entièrement sur l’électricité renouvelable, dont le déploiement à grande échelle reste difficile du fait notamment des enjeux de robustesse des réseaux, sans reconnaître aux autres formes d’électricité décarbonées un rôle stabilisateur essentiel, il est à craindre que la stratégie de la Commission ne favorise pas en réalité la progression de l’électricité dans les usages.

La stratégie pour l’hydrogène
La principale nouveauté de cette stratégie par rapport aux précédentes publications de la Commission réside dans la nouvelle catégorisation des différents types d’hydrogène. Alors que l’hydrogène était auparavant classé en différentes couleurs (vert, bleu, gris), il est désormais catégorisé de la façon suivante :

  • propre : production exclusivement basée sur les énergies renouvelables ;
  • bas carbone : produit à partir de reformage accompagné de captage et stockage du carbone ou d’électricité non renouvelable (dont nucléaire) ;
  • fossile : issu du gaz ou du charbon.

La stratégie indique que la priorité de l’Union européenne doit être de développer l’hydrogène renouvelable.

La priorité donnée à l’hydrogène renouvelable soulève la question des garanties d’origine et de la fiabilité de ce système de certification : le recours aux garanties d’origine ouvre la possibilité aux producteurs d’hydrogène d’acheter des certificats à d’autres producteurs ou sur les marchés et ne donne pas l’assurance que l’hydrogène utilisé par l’électrolyse est produit à partir d’énergies effectivement renouvelables.

Projets de lois en cours et à venir

Malgré le contexte sanitaire, la Commission européenne s’était engagée à ne pas retarder son calendrier d’actions législatives en matière d’énergie et de climat. L’année 2021 sera donc le point de départ de plusieurs projets de directives et de règlements, notamment dans le cadre du nouveau paquet législatif Fit for 55.

Le règlement établissant le cadre requis pour parvenir à la neutralité climatique
Le règlement établissant le cadre requis pour parvenir à la neutralité climatique, surnommé « loi climat », doit donner une base légale à l’objectif de neutralité climatique fixé pour 2050 et à la révision de l’objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre pour 2030 qui doit s’ensuivre.

Dans son projet de loi initial, la Commission a proposé que le nouvel objectif 2030 soit fixé à 50 ou 55 % de réduction des émissions de gaz à effet de serre par rapport à 1990 (contre 40 % actuellement). Alors que le Conseil de l’Union européenne s’est orienté vers un objectif de 55 %, le Parlement européen a quant à lui voté un objectif à 60 %.

La discussion sur l’objectif 2030 est de plus en plus détournée de son but initial, définir une trajectoire réaliste vers la neutralité carbone, et se trouve utilisée à des fins de communication par le Parlement. On peut déplorer cette tendance à la surenchère, déconnectée des questions de faisabilité qui ne favorise pas l’émergence d’un cadre législatif adapté à une transition écologique rationnelle acceptable par les acteurs économiques.

La directive efficacité énergétique (EED)
La directive efficacité énergétique a été adoptée en 2012 puis révisée en 2018 dans le cadre du paquet énergie propre. Elle contient plusieurs dispositions essentielles pour la politique énergétique de l’Union :

  • elle fixe le niveau d’efficacité énergétique que l’Union doit atteindre d’ici à 2030 ;
  • elle impose aux États membres de réaliser des économies d’énergie, sachant qu’elles peuvent être exprimées en énergie primaire et/ou en énergie finale ;
  • elle propose un coefficient par défaut de conversion de l’électricité en énergie primaire de 2,1.

La révision du texte est attendue pour le 2e semestre de 2021 dans le cadre du paquet Fit for 55.

Le texte actuel de la directive efficacité énergétique ne fait pas une distinction claire entre amélioration de l’efficacité énergétique et économies d’énergie par réduction brute des consommations, qu’elles soient carbonées ou non. Or seule la consommation d’énergies fossiles devrait être ramenée à zéro d’ici à 2050 car l’énergie reste nécessaire à l’activité économique et en particulier à la réindustrialisation de l’Europe. Il est impératif que la révision de l’EED permette de différencier clairement les objectifs liés aux énergies fossiles de ceux liés aux énergies décarbonées.

La directive sur la performance énergétique des bâtiments (EPBD)
La directive EPBD a été adoptée en 2010 puis révisée en 2018. Elle précise les règles, les objectifs d’amélioration de l’efficacité énergétique applicables au parc immobilier européen ainsi que les moyens réglementaires par lesquels les États membres doivent oeuvrer à cette amélioration. Ce texte, censé découlé de la directive EED, en diffère cependant sensiblement sur certains points, notamment le facteur de conversion de l’électricité en énergie primaire.

La directive EPBD contient notamment les dispositions suivantes :

  • elle impose aux États membres d’établir une stratégie de rénovation à long terme pour le résidentiel et le non-résidentiel ;
  • elle impose d’exprimer la performance énergétique d’un bâtiment en énergie primaire ;
  • elle impose aux États membres de fixer des standards pour l’équipement du parc immobilier en prises pour véhicules électriques.

La révision du texte est attendue pour le 2e semestre de 2021 dans le cadre du paquet Fit for 55 et de la stratégie « vague de rénovations ».

Le texte actuel de l’EPBD est déconnecté de l’objectif de décarbonation de l’Europe. Les dispositions de cette directive ne visent qu’à réduire les consommations énergétiques exprimées en énergie primaire du parc immobilier européen, sans se soucier de l’entraînement ou non d’une réduction des émissions de gaz à effet de serre.

Lire aussi : Eliminer les freins réglementaires à la décarbonation des bâtiments – Le cas de la directive EPBD

La directive batteries
La directive batteries a été adoptée en 2006. Sa révision sera lancée à la fin de l’année 2020.

La directive batteries vise à améliorer la performance environnementale des piles et accumulateurs en réglementant l’utilisation des matériaux critiques dans la fabrication de batteries et en établissant des normes pour la gestion des déchets de ces batteries.

Il est essentiel que la directive fixe des valeurs normatives maximales au contenu en CO2 des batteries mises sur le marché européen et impose leur recyclabilité.

La directive sur l’infrastructure pour carburants alternatifs (AFID)
La directive AFID a été adoptée en 2014 et doit être révisée en 2021.

Ce texte établit des normes applicables au déploiement d’une infrastructure pour carburants alternatifs, c’est-à-dire aux stations de recharge pour voitures électriques et aux points de ravitaillement en gaz naturel. Elle fixe des échéances en 2020 et 2025 pour le déploiement de cette infrastructure.

Dans la révision annoncée, une attention particulière devra être portée aux questions d’interopérabilité des bornes, de qualité de service et de conditions à prévoir pour assurer le pilotage des recharges.

Le règlement sur les normes de performance en matière d’émissions de CO2 pour les voitures neuves
Le texte actuel a été adopté en 2019 et sera révisé au cours de l’année 2021.

Il fixe des standards et des objectifs très exigeants aux horizons 2025 et 2030 pour les émissions de CO2 moyennes des voitures neuves et véhicules utilitaires légers neufs. Il met en place un système de bonus-malus qui récompense ou pénalise les constructeurs en fonction du niveau d’émission de leurs voitures.

La révision du règlement pourra être l’occasion d’examiner la possibilité de réglementer le contenu carbone en cycle de vie, du berceau à la tombe, en lien avec les travaux sur l’institution d’un mécanisme d’ajustement aux frontières.

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