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RE 2020 : en route pour la dernière étape

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La RE 2020 fait l’objet de discussions depuis bientôt 4 ans. Une nouvelle procédure de concertation a été menée par l’administration pendant l’été. Il s’agit à présent de finaliser la réglementation, en définissant de façon précise les critères essentiels qui doivent la sous-tendre, ainsi que les valeurs des seuils à retenir.

Équilibre des Énergies (EdEn) propose une approche qui respecte des principes de la loi énergie- climat, évite une rupture trop brutale avec la réglementation thermique RT 2012, limite les surcoûts entravant la reprise de la construction et ouvre la voie à de nouveaux progrès.

Appliquer les principes de la loi énergie-climat à la RE2020

La loi énergie-climat fait de la neutralité carbone à l’horizon 2050 son objectif premier, objectif qui doit être atteint par la combinaison de deux actions essentielles :

  • une réduction des consommations d’énergie grâce à la sobriété et à une meilleure efficacité énergétique ;
  • la substitution d’énergies décarbonées aux énergies fossiles.

Dans le domaine du bâtiment neuf, la traduction de ces actions doit conduire à :

  • renforcer la qualité des bâtiments et de leurs systèmes énergétiques ;
  • réduire les émissions de CO2 liées d’une part à la construction, d’autre part à l’exploitation du bâtiment. Ces deux questions, qui relèvent de problématiques différentes, doivent être traitées de façon distincte, sachant que la neutralité carbone devra être l’objectif de l’une comme de l’autre.

Lire aussi : RE 2020 – Réaction d’Equilibre des Energies aux premiers arbitrages

Une RE 2020 s’appuyant sur deux critères directeurs : le Bbio (volet énergie) et les émissions annuelles de CO2 à l’exploitation (volet climat)

EdEn propose d’asseoir la RE 2020 sur deux critères directeurs qui permettent de répondre aux objectifs de la politique nationale énergie-climat :

  • pour le volet énergie : l’indicateur Bbio. Cet indicateur de besoin bioclimatique, présent aujourd’hui dans la RT 2012, mais dont le rôle est actuellement marginal, doit devenir un critère directeur ;
  • pour le volet climat, l’indicateur d’émissions annuelles de CO2 (Eges Énergie). Exprimé en kg de CO2eq par m2 et par an, prévu par la directive (UE) 2018/844 du 30 mai 2018, cet indicateur doit devenir un second critère directeur, d’importance égale au premier.
  • Ces deux points sont précisés ci-après. Des critères complémentaires pourront s’y ajouter, mais en veillant à ne pas complexifier inutilement le système.

    Le volet énergie

    Critère directeur : l’indicateur de besoin bioclimatique (le Bbio)

    EdEn soutient l’orientation prise par les pouvoirs publics de faire de l’indicateur Bbio un critère directeur de la RE 2020 pour le volet énergie. Le Bbio est en effet le critère le plus à même d’inciter à l’amélioration de la qualité du bâti tout en participant à la baisse des émissions des CO2 et à la diminution des factures énergétiques.

    Une plus grande exigence sur le Bbio traduira l’objectif politique d’amélioration de la qualité du bâti et constituera un progrès par rapport à la RT 2012. Cette dernière, en ne faisant pas du Bbio un critère directeur, a contribué à faire émerger des bâtiments chauffés aux énergies fossiles moins bien isolés et plus chers à chauffer que des logements chauffés aux énergies décarbonées.

    Pour parvenir à une RE 2020 exemplaire sur la qualité du bâti (principe de précaution face à un avenir énergétique incertain), EdEn appelle les pouvoirs publics à fixer les nouveaux plafonds du Bbiomax à – 30 % ou – 40 % par rapport aux exigences de la RT 2012. Ces seuils peuvent être atteints sans surcoût excessif en permettant d’amener l’ensemble du parc à une haute qualité du bâti, quelle que soit la forme d’énergie utilisée.

    L’exigence Bbiomax doit être différenciée selon qu’il s’agit de logements individuels ou collectifs

    EdEn souscrit à la volonté des pouvoirs publics de moduler les exigences de la RE 2020, en particulier sur le volet énergie, en fonction de la typologie des bâtiments. La différence de perméabilité et de compacité est un élément à prendre en compte dans le Bbio.

    Cette décision permet de revenir sur l’une des erreurs originelles de la RT 2012. En effet, sous couvert d’un traitement égalitaire de l’ensemble des bâtiments, la RT 2012 avait créé des surcoûts importants pour les logements collectifs, pour quelques kWh économisés, et avait nécessité l’instauration d’une dérogation pour y pallier.

    L’exigence Bbiomax doit tenir compte des apports actifs en énergie renouvelable consommés localement

    Afin de valoriser les énergies renouvelables liées aux bâtiments (photovoltaïque autoconsommé, pompes à chaleur, etc.), le Bbiomax doit être modulé en fonction des apports actifs en énergies renouvelables. En effet, moyennant un supplément d’investissement, ces systèmes permettent d’apporter au logement de l’énergie puisée dans l’environnement. Cette énergie n’est pas, dans sa nature, différente des apports solaires passifs dont on tient compte dans le calcul du Bbio. Il serait anormal que les logements équipés de tels systèmes se trouvent pénalisés du fait du supplément d’investissement qu’ils impliquent.

    • Dans le cas des pompes à chaleur (PAC), qui sont appelées à devenir la solution de référence dans les logements collectifs au cours de la RE 2020, EdEn recommande de moduler le plafond Bbiomax en fonction du coefficient de performance saisonnier de la PAC (SCOP). La modulation devrait être de l’ordre de + 30 % pour une PAC présentant un coefficient de performance supérieur à 3 et devrait être ouverte aux PAC hybrides.
    • La production locale d’électricité autoconsommée pourra également être prise en compte, du fait notamment que cette production peut servir à satisfaire des usages non pris en compte dans la RE 2020 (usages spécifiques, pour la mobilité électrique notamment). Cette prise en compte pourra, à l’avenir, tenir de l’existence de systèmes de stockage à demeure ou de V2G.

    En conclusion, selon les informations dont EdEn dispose et en supposant qu’un Bbio de 60 tel que calculé dans la RT2012 corresponde approximativement à un Bbio de 100 dans la RE 2020, EdEn estime que le Bbiomax RE 2020 pourrait être fixé à 60 pour les maisons individuelles et 70 pour les logements collectifs (80 et 90 en cas de PAC et avec une modulation appropriée pour l’électricité d’origine photovoltaïque autoconsommée).

    Critère complémentaire : l’énergie primaire (le Cep)

    La consommation d’énergie primaire, qui était le critère directeur de la RT2012, ne peut être désormais considérée que comme un critère complémentaire

    Avec un Bbio plus exigeant mettant en contrainte les besoins de chaud, de refroidissement et d’éclairage et un indicateur Eges Énergies (cf. Critère directeur) limitant les émissions CO2 des cinq usages réglementaires et en particulier ceux de l’eau chaude, le critère Cep n’a plus grande utilité dans la mise en oeuvre d’une nouvelle réglementation.

    Cependant, il pourra répondre à deux préoccupations :

    • satisfaire aux exigences, en l’état, de la directive européenne sur la performance énergétique des bâtiments ;
    • servir de « filet de sécurité » afin d’éviter des phénomènes non désirés liés à la migration de la RT2012 vers la RE2020, mais sans chercher à peser sur les choix au travers de ce critère.

    Comme pour le Bbio, EdEn appelle à conserver un certain niveau de différenciation entre le Cep max des maisons individuelles et celui des logements collectifs, qui pourrait être de 7,5 % (contre 15 % avec l’actuelle modulation de la RT2012).

    Selon les éléments en possession d’EdEn et en supposant qu’un Cep de 50 tel que calculé dans la RT2012 corresponde approximativement à un Cep de 90 dans la RE 2020, le critère Cepmax pourrait être fixé à 90 kWh/m2.an pour les maisons individuelles et 97 kWh/m2.an pour les logements collectifs.

    La consommation d’énergie primaire non renouvelable n’est pas un critère approprié

    EdEn considère que l’alternative au Cep que constitue le Cep. nr (non renouvelable) n’a pas, tel qu’il serait calculé, à être retenue, car ce critère valoriserait uniquement les énergies renouvelables produites localement alors que les énergies de réseaux seront de plus en plus décarbonées. Ce mode de calcul serait en contradiction avec la réglementation européenne qui ne fait pas de distinguo entre les énergies renouvelables locales ou de réseau. Pour valoriser les apports renouvelables propres au bâtiment, EdEn recommande d’insérer une modulation du Bbiomax (cf. L’exigence Bbiomax).

    Par ailleurs, EdEn estime que la réinjection de la production locale d’électricité d’origine photovoltaïque sur le réseau constitue une forme d’activité commerciale qui doit être traitée dans un autre cadre que la réglementation de la construction.

    Le volet Carbone

    Critère directeur : les émissions annuelles de CO2 (l’Eges Énergie)

    L’Eges Énergie doit être retenu comme critère directeur du volet carbone

    EdEn considère que pour s’attaquer aux gaz à effet de serre, l’encadrement des émissions annuelles de CO2 selon la méthodologie européenne est la meilleure solution pour avoir une action efficace. Ce critère est prévu par la directive européenne sur la performance énergétique des bâtiments et peut être conçu dans une optique de trajectoire de progrès conduisant à la neutralité carbone.

    Il présente l’avantage d’être simple à calculer et de pouvoir également s’appliquer aux bâtiments existants. Il assure ainsi une cohérence entre le neuf et l’existant.

    Pour véritablement assurer une RE 2020 exemplaire sur le plan climatique, EdEn préconise de fixer pour l’Eges Énergie un même seuil, relativement exigeant, pour tous les bâtiments (8 kg de CO2eq par m2 et par an) et de le renforcer progressivement dans le temps en fonction des progrès effectués.

    Critère complémentaire : le contenu en GES à la construction (l’Eges PCE)

    Le contenu en GES de la construction : un critère qui pourra devenir un critère directeur, mais qui n’est pas aujourd’hui suffisamment mature

    La prise en compte du contenu en CO2 à la construction, dans une optique ACV, est sans doute souhaitable, mais pose beaucoup de problèmes méthodologiques qui risquent d’en faire un critère complexe, mal compris et inefficace. En effet, beaucoup de paramètres demeurent forfaitaires et, in fine, le critère semble faire peu de différence entre les modes de construction. Le cas des constructions en bois donne lieu à débat. EdEn estime donc qu’il serait prématuré de faire du contenu carbone du bâtiment et de ses équipements un critère réglementaire.

    Si toutefois cette option est retenue, EdEn préconise que le critère portant sur les émissions à la construction Eges PCE soit isolé du critère Eges Énergie, limité à un critère portant sur les éléments mesurables et qu’il soit complété par un label pouvant, le moment venu, être intégré dans la réglementation.

    Le ratio de chaleur renouvelable : un critère dont on peut se passer

    EdEn recommande de ne pas utiliser le RCR comme critère pour le volet carbone, même à titre secondaire, car sa méthodologie n’est pas mature (elle mélange énergie primaire et énergie finale) et risquerait même de pénaliser les PAC. Afin de valoriser la chaleur renouvelable, EdEn préconise une modulation du Bbiomax (cf. L’exigence Bbiomax).

    Conclusions

    EdEn considère qu’il est possible de faire émerger une RE 2020 qui respecte des principes de la loi énergie-climat, évite une rupture trop brutale avec la réglementation thermique RT 2012, n’entraîne pas de surcoûts entravant la reprise de la construction et ouvre la voie à de nouveaux progrès. Afin d’atteindre les différents objectifs définis par les pouvoirs publics, EdEn propose d’asseoir la RE 2020 sur les critères suivants :

    Nota 1 : La modulation pour prise en compte de l’électricité d’origine photovoltaïque autoconsommée est à déterminer.

    Nota 2 : Ces estimations sont fondées sur les ordres de grandeur des résultats publiés par l’administration en juillet 2020 auxquels conduisent les nouvelles méthodes de calcul des indicateurs énergie. Elles sont destinées à traduire l’évolution préconisée par rapport aux pratiques actuelles, mais les valeurs absolues peuvent être revues en fonction de l’avancement des calculs.

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