Treize ans après l’adoption de la Directive 2006/66/EC, le seul texte législatif européen entièrement dédié aux batteries, un travail d’évaluation a été mené par la Commission afin d’identifier les succès et lacunes dans la mise en œuvre de cette directive. Cette évaluation, reprise dans la Communication de la Commission du 9 avril, est destinée à servir de base à la définition des politiques qui serviront à développer la chaîne de valeur des batteries en Europe.
Petit rappel du contenu de la Directive 2006/66/EC :
- La Directive de 2006 établit les quantités maximales de certains composants chimiques et métaux contenus dans les batteries ;
- charge les Etats Membres d’encourager l’amélioration des performances environnementales des batteries ;
- impose que les batteries usagées soient collectées, recyclées et éliminées ;
- établit des taux minimaux de collecte des batteries usagées ;
- définit les responsabilités financières relatives à ces programmes de collecte ;
- définit les règles encadrant l’étiquetage, le marquage, le contrôle et toute autre procédure administrative liée à la gestion des batteries.
Les conclusions de l’évaluation de la Directive livrent un bilan mitigé : si la plupart des Etats Membres ont atteint leur objectif de collecte des batteries usagées pour 2012 (fixé à 25%), seul 14 d’entre eux ont atteint leur objectif de 2016 (fixé à 45%). La France fait partie de ceux qui ont manqué (de peu) leurs objectifs, parvenant à un taux de collecte de 44,5% en 2016. En ce qui concerne les normes de recyclage fixées par la directive, l’évaluation conclut qu’elles ont été bien respectées, notamment dans le recyclage des batteries plomb-acide. Néanmoins, du fait des taux de collecte restés trop bas, l’évaluation pointe que la directive n’a pas permis d’atteindre un haut niveau de récupération des matières et que son objectif global n’a donc pas été atteint.
L’Union Européenne saura-t-elle se donner les moyens de ses ambitions?
Reprenant les conclusions de l’évaluation, la communication de la Commission sur la Directive y ajoute une vision de ce que pourrait être le secteur des batteries à l’horizon 2050. Le stockage deviendrait ainsi “le principal moyen d’intégrer les sources renouvelables dans le système énergétique, au fur et à mesure que la production thermique diminuera et que la possibilité d’influencer le comportement des consommateurs au moyen du prix de l’énergie sera davantage exploitée”. Un tel développement, d’après la Commission, conduirait le stockage annuel d’électricité en 2050 à être multiplié par dix au moins par rapport à 2015. Alors que que l’Europe ne fabrique actuellement que 3% des batteries au monde – contre 85% pour l’Asie – des investissements colossaux seront nécessaires afin de tenter de rattraper ce retard. La Commission indique ainsi que 20 à 30 usines géantes devraient être construites en Europe rien que pour assurer la production de cellules de batterie.
La question est maintenant de savoir quels seront les outils mis en œuvre pour réaliser cette vision. Après le lancement en 2017 de l’Alliance des Batteries qui rassemble acteurs de l’industrie et institutions et la mise en place depuis mai 2018 du plan d’action stratégique sur les batteries, l’adoption d’une nouvelle législation portant les ambitions de l’UE semble tout à fait à propos. Bien que ni le rapport d’évaluation ni le rapport de la Commission n’annonce officiellement une révision de la directive de 2006, des éléments pointant vers un prochain renouveau de la politique européenne en matière de batteries sont clairement présents dans les deux textes.
La communication de la Commission explique ainsi que la stratégie des batteries aura un rôle clé dans la vision à long terme pour l’avenir industriel de l’UE que le Conseil Européen a appelé de ses vœux lors de sa réunion du 21 mars. Le rapport d’évaluation pointe encore plus clairement vers une refonte du cadre législatif en soulignant que les récents progrès techniques dans le secteur des batteries justifieraient un relèvement des objectifs minimaux de collecte et de recyclage et en indiquant que cette évaluation a été effectuée “dans le cadre d’un processus pouvant conduire à une révision de la Directive”. De toute évidence, les lignes sont appelées à bouger prochainement sur le front européen de la batterie.