Les progrès réalisés sur le plan technique, la lutte contre le réchauffement climatique et la nécessité d’économiser nos ressources naturelles permettent au bois, le plus ancien matériau de construction de l’humanité, d’être aujourd’hui un matériau d’avenir.
Construire en bois répond plus que jamais aux enjeux de la planète : réduction de l’empreinte carbone et des consommations énergétiques des bâtiments, amélioration des techniques, optimisation des ressources, confort et bien-être pour les usagers.
L’arbre, pompe à carbone naturelle
Durant sa croissance, l’arbre absorbe du CO2, rejette l’oxygène et stocke le carbone : c’est la photosynthèse qui lui permet de grandir. Une fois coupé, transformé, puis protégé à l’intérieur des bâtiments dont il assure la structure, le bois de gros œuvre reste, pour une très longue durée, un stock de carbone prélevé naturellement dans l’atmosphère. À la place de l’arbre prélevé, un nouvel arbre sera planté et se développera. Ce jeune sujet réalimentera la pompe à CO2, créant ainsi un cercle vertueux et puissant de capture de carbone. Construire en bois issu de forêts gérées durablement, c’est créer un véritable puits de carbone.
On estime ainsi qu’un mètre cube de bois stocke 700 kg de CO2 (1). Le process industriel de transformation du bois en matériau de gros œuvre de type lamellé contre-croisé (CLT : Cross Laminated Timber) est lui-même peu énergivore et représente environ 183 kg de CO2/m3. Si l’on y ajoute le transport depuis une usine située à environ 1 000 km du chantier (environ 57 kg de CO2), un m3 de bois massif CLT mis en œuvre sur chantier stocke 460 kg de CO2 là où un mètre cube de béton en émet l’équivalent (471 kg CO2/m3), le gain carbone est donc de quasiment une tonne de CO2 /m3.
Réduire l’empreinte carbone liée à la construction est essentiel : l’acte de construire représente plus de 60 % des émissions d’un bâtiment sur tout son cycle de vie (2). Utiliser le bois massif comme matériau de structure constitue l’une des solutions.
Afin de faire prendre conscience de l’urgence à diminuer l’empreinte carbone des bâtiments, le groupe Woodeum-WO2, associé aux plus grands bureaux d’études, architectes et promoteurs du secteur, a créé l’Association pour le développement du bâtiment bas carbone (BBCA) en 2016 dans le sillon de la COP21. Le référentiel BBCA est un référentiel monocritère qui quantifie et valorise, grâce à une mesure certifiée indépendante, la réduction de l’empreinte carbone du bâtiment sur l’ensemble de son cycle de vie (construction-exploitation-fin de vie-stockage carbone). Les seuils ont été fixés avec l’objectif ambitieux de diminuer par deux les émissions de gaz à effet de serre, c’est-à-dire de passer de 1,5 tonne de CO2/m² à 750 kg de CO2/m². Aujourd’hui près de 100 opérations (en neuf et rénovation) bas carbone sont engagées et 60 bâtiments ont déjà été labellisés BBCA. Enrichie par les retours d’expériences de plus d’une centaine de membres dans les secteurs de la construction et de l’immobilier, le label a été moteur et précurseur du lancement du label d’État E+C- en cours d’expérimentation. Cette année, un remarquable manuel de la construction bas carbone à l’usage des décideurs a été publié par l’association.
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Le bois, matériau d’ingénierie exceptionnel
Le développement des grandes structures bois après-guerre s’est accompagné du développement de nouveaux matériaux de structure bois, grâce aux techniques de collage structural. Ces technologies ont permis de dépasser les dimensions naturelles de l’arbre en créant des profilés de grande dimension et d’augmenter les performances mécaniques par tri et élimination des défauts du bois.
Ces nouveaux matériaux, dits bois d’ingénierie comme le CLT ou le LVL (Laminated Verneer Lumber, lamibois en français), devenus aujourd’hui traditionnels ont ouvert un champ de possibilités très large à la construction bois moderne.
Leurs principales qualités communes sont :
- des performances mécaniques très élevées : les processus de production industriels et la sélection des meilleurs bois permettent d’obtenir des résistances comparables aux matériaux traditionnels ;
- des matériaux optimisés et fiables : le contrôle qualité et l’élimination systématique des défauts naturels du bois permettent d’obtenir des matériaux aux dimensions optimisées et conformes aux plus hautes exigences inhérentes aux matériaux de structures ;
- des produits certifiés et des calculs normés : grâce à une utilisation large dans le monde, et plus particulièrement en Europe, les bois d’ingénierie ont été intégrés au corpus normatif traditionnel permettant de qualifier les produits et d’en permettre le calcul et la mise en œuvre aisée ;
- l’utilisation optimisée des ressources : grâce aux techniques de collage moderne, il est possible d’obtenir les meilleurs rendements des bois issus exclusivement de forêts françaises et européennes gérés durablement.
Mis en œuvre comme matériaux de structure des bâtiments, les bois d’ingénierie révolutionnent l’organisation et la précision des chantiers. Le chantier n’est plus le lieu de production, avec les approximations et les aléas qui en découlent, mais un lieu d’assemblage de produits usinés, ajustés au millimètre. Chaque élément structurel est dessiné en trois dimensions, fabriqué en usine avant d’être livré sur place par ordre de pose. L’usinage permet de diviser par deux le temps de chantier gros œuvre et de diviser par six la rotation des camions durant le chantier. Il n’y a pas de temps de séchage contrairement au béton, ce qui permet l’intervention immédiate des corps d’état de second œuvre après la pose de la structure. Sur des chantiers importants, la co-activité peut même être envisagée car l’absence d’étaiement permet de libérer les zones d’intervention dès l’achèvement de la pose. Enfin, ce mode constructif réduit considérablement les nuisances pour le voisinage : les chantiers sont plus rapides, plus silencieux et plus propres.
Confort thermique et consommations énergétiques : d’excellentes performances, même là où on n’attendait pas le bois
Une étude menée par Pouget Consultants (3) et contrôlée par l’Apave sur un immeuble réalisé par le groupe Woodeum-WO2 a permis de mettre en évidence les performances exceptionnelles de la construction en bois massif CLT en matière de confort thermique des bâtiments, grâce à la faible inertie du bois.
Le bois, à l’inverse des matériaux à grande inertie tels que la pierre ou le béton, a l’avantage de ne pas absorber les calories ou les frigories ajoutées à l’intérieur d’une pièce. Ainsi, très peu de temps après sa mise en chauffe ou en refroidissement, un bâtiment en bois massif CLT atteint la température de confort et la conserve grâce à ses importantes qualités d’isolation.
Cela ouvre des perspectives très prometteuses en matière d’économie de chauffage : la domotique lance le chauffage quelques minutes avant l’arrivée des occupants et tire ainsi parti de l’intermittence d’occupation. De même, le moindre rayon de soleil d’hiver permet de chauffer les bâtiments en bois massif CLT, alors qu’il serait absorbé par des murs en béton.
Mais c’est sur le confort d’été que les conclusions de l’étude sont les plus prometteuses : alors qu’il est communément accepté que nos anciennes bâtisses en pierre sont agréables en été car elles gardent la fraîcheur, le réchauffement climatique et la survenue de plus en plus fréquente d’épisodes caniculaires remet en cause le dogme de l’inertie comme réponse unique au confort d’été de nos bâtiments. Dans nos villes modernes, surchauffées en été, l’inertie de la ville et des bâtiments pose un problème de confort dès que la chaleur s’installe. Le bois massif CLT permet de décharger facilement l’énergie emmagasinée par la structure d’un bâtiment et ainsi de combattre l’inconfort en été.
Une paroi en béton, à forte inertie, ayant emmagasiné de la chaleur, continue de rayonner cette chaleur durant la nuit, au grand désespoir des occupants… Une paroi en bois massif CLT, au contraire, abaisse très rapidement sa température dès la nuit arrivée. Les logements en bois massif CLT sont ainsi plus confortables que les constructions en béton. Le bois massif CLT, combiné à des dispositions constructives telles que des toitures végétalisées, constitue une excellente réponse au phénomène « d’îlot de chaleur » que connaissent désormais nos villes.
Une formidable atout pour notre bien-être
À la fin des années 1970, des chercheurs ont commencé à étudier scientifiquement les effets intuitifs de la nature sur l’homme. Le concept de biophilie a ainsi été défini en 1984 par le biologiste Edward O. Wilson comme « l’affinité innée de l’homme pour le vivant et les systèmes naturels ».
En 2019, en partenariat avec le groupe Woodeum-WO2, le docteur Florence Aviat du laboratoire Your Research et le professeur Didier Lepelletier du CHU de Nantes ont lancé une étude bibliographique et scientifique sur le sujet de la santé des personnes dans les bâtiments en bois. Cette recherche recense des études publiées dans des revues scientifiques à comité de relecture, démontrant l’impact de la présence de bois massif sur la réduction du stress, la productivité et l’amélioration de la qualité du sommeil. Des études convergentes constatent ainsi une diminution de la fréquence cardiaque et de la pression artérielle (4). Par ailleurs, les molécules odorantes issues de certaines essences peuvent avoir des qualités relaxantes et antalgiques par action sur le système nerveux central. Du point de vue de la lutte contre les maladies, le bois dispose de propriétés antimicrobiennes naturelles : les caractéristiques anatomiques du bois (porosité, pH de l’essence, molécules chimiques antimicrobiennes) empêchent la survie et la multiplication de micro-organismes redoutés. Aucun autre matériau ne possède ces propriétés naturelles. Du point de vue des infections virales, une étude publiée par Chin et al. dans le journal scientifique The Lancet Microbe (5), a démontré que le coronavirus COVID-19 survivait beaucoup moins longtemps sur le bois que sur le verre, le plastique ou le métal.
La présence en grandes quantités de bois massif laissé visible à l’intérieur de tous les bâtiments présente de nombreux bénéfices prouvés pour le bien-être et la santé.
Conclusion
Si en 2018 la construction bois représentait seulement 4,3 % du marché résidentiel collectif (6), les perspectives de développement sont excellentes. Le léger surcoût du matériau par rapport à un matériau traditionnel est compensé par la rapidité des chantiers et les économies de long terme que permet ce mode constructif. Suivant l’approche innovante lancée il y a six ans par Woodeum et WO2, de nombreux promoteurs immobiliers proposent désormais des produits bas carbone, construits en bois. Toutes les grandes entreprises françaises de construction, Bouygues, Vinci, Eiffage pour ne nommer qu’elles, ont développé une filiale de construction bois et l’entreprise Piveteau a ouvert une première usine de fabrication de CLT en Vendée pour répondre à la demande croissante du marché. Et la ressource ne manque pas, aujourd’hui la production annuelle européenne de panneaux CLT est estimée à 610 000 m3, ce qui permet de couvrir près de 50 % de la production annuelle francilienne de logements. Enfin, les collectivités locales et l’État sont une force motrice pour le développement de ce mode constructif, respectueux de l’environnement et aux bienfaits reconnus pour ses usagers.
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(1) Source : « Étude Carbone 4 » de mai 2014. Calcul pour 1 m3 de béton armé, 280 kg ciment/m3, distance chantier 50 km : (production: 458 kg CO2/m3) + (transport: 13 kg CO2/m3) = 471 kg CO2/m3 de béton armé.
Calcul pour 1 m3 de CLT Stora Enso, distance chantier Ybbs/Paris 1 130 km : (stockage carbone: -700 kg CO2/m3) + (production: 183 kg CO2/m3 (transport: 57 kg CO2/m3) = -460 kg/m3 de CLT Stora Enso.
(2) Source : Test HQE Performance pour l’échantillon 2012-2013 : bureaux et logements collectifs.
(3) Étude Pouget Consultants – Inertie et Bâtiments CLT Woodeum – Juillet 2018.
(4) Étude de Sakuragawa et al.(2005).
(5) “Stability of SARS-CoV-2 in different environmental conditions », Chin et al., The Lancet Microbe, 2 avril 2020.
(6) « Enquête nationale construction bois », juin 2019, financée par France Bois Forêt et CODIFAB.