Plusieurs pays européens suivront les objectifs annoncés par l’Union Européenne d’atteindre 20% d’énergies renouvelables dans la consommation totale d’énergie pour 2020, si leurs économies l’autorisent. Notre ministre de l’Ecologie, du Développement durable et de l’Energie ne cache pas ses ambitions pour la France mais ne regarde pas la cohérence des arrêtés publiés par l’administration.
La situation actuelle est des plus alarmante concernant les émissions mondiales de Co2. La responsable climat de l’ONU, Christina Figueres, annonçait lundi dernier dans les Echos « Nous sommes entrés dans une nouvelle zone de danger ». En effet, la quantité de gaz carbonique dans l’atmosphère aurait dépassé un seuil historique, soit 400 ppm (parties par million de molécule d’air hors vapeur d’eau), nous rapprochant dangereusement d’un bouleversement climatique pour la planète. La réglementation thermique imposée aux constructions neuves depuis le 1er janvier 2013 pour diminuer par un facteur 3 la consommation d’énergies n’impose aucun plafond d’émissions de co2. L’annexe VIII de l’arrêté re-publié le 7 mai dernier par les deux ministères concernés ne communique toujours aucune valeur à la modulation carbone de l’électricité en France. On peut constater avec BatiEtude que 70% des bâtiments collectifs construits depuis 2011 sont équipés de chaudière au gaz! La réglementation en vigueur n’est pas cohérente avec les objectifs déclarés par les ministres!
Le 22 février dernier, Delphine Batho annonçait, lors d’un déjeuner entre ministres européens, vouloir soutenir un triple objectif de développement des énergies renouvelables, d’efficacité énergétique et de réduction des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030.
Cette déclaration, encore informelle, a été saluée par Greenpeace qui n’a pas attendu pour demander au Président de la République de confirmer ces intentions en annonçant les objectifs visés et les contraintes associées.
En effet, la France n’avait pas atteint son objectif symbolique de 21% d’électricité d’origine renouvelable pour 2010 avec un résultat de seulement 14,6%. Autant dire que l’objectif ciblé pour 2020 semblait donc déjà très ambitieux…
Pour y arriver, le pays s’est donc engagé à suivre son plan d’action national afin d’atteindre 27% de parts d’énergies renouvelables pour l’électricité, 32% pour la chaleur et 10% pour les transports, ce qui n’est pas très éloigné des pronostics de Jean Bergougnoux. Ce dernier annonçait lors de notre atelier du mois d’avril : “Cela veut dire qu’il ne peut y avoir plus de 10% de thermiques à flammes brûlant du gaz. Il resterait donc 40% d’EnR pour produire de l’électricité. Il y aura environ 15% d’hydraulique. Il reste donc 25% d’EnR qui seront essentiellement de l’éolien et du photovoltaïque (avec un peu de l’énergie des mers).”
Le débat national sur la transition énergétique DNTE devrait communiquer ses conclusions au gouvernement en juillet afin de donner naissance à un nouveau projet de loi sur l’énergie à l’automne qui devrait vraiment prendre en compte la mesure du co2, grande oubliée des arrêtés du Grenelle de l’Environnement. Dans ce but, le groupe de travail «Quels choix en matière d’énergies renouvelables et de nouvelles technologies de l’énergie et quelle stratégie de développement industriel et territorial ?» a déjà présenté le 15 avril dernier son rapport au Conseil National de la transition énergétique. Il propose par exemple un nouvel objectif pour le photovoltaïque compris ente 15 000 et 25 000 MW face aux 5 400 MW prévus aujourd’hui.
A la suite de la déclaration de Madame Batho, Greenpeace publiait dernièrement : « Des objectifs contraignants de 45% d’énergies renouvelables et d’au moins 55% de réduction des émissions de gaz à effet de serre domestiques d’ici 2030 sont atteignables mais avant tout indispensables pour faire face aux crises climatique et énergétique… Cet engagement français, s’il était confirmé, ferait contrepoids à l’initiative du Royaume-Uni qui refuse pour l’heure de défendre un objectif contraignant de développement des énergies renouvelables à l’échelle européenne. La position française permettrait de créer une dynamique positive au sein de l’Union européenne alors que six pays d’Europe centrale et orientale (Roumanie, République tchèque, Slovaquie, Hongrie, Bulgarie, Pologne) déclaraient récemment être opposés à l’idée même de « fixer des règles juridiques de nature obligatoire » sur l’énergie et le climat pour 2030 ».
Pour ce faire, l’association écologique devra rejoindre les décisions rationnelles du gouvernement pour freiner la hausse des importations de gaz et rééquilibrer les moyens thermiques dans le bâtiment neuf qui donne une part de plus de 70% au chauffage au gaz dans le collectif depuis 2011. Il devient urgent de rendre cohérent les décrets de la RT2012 avec les objectifs de baisse des émissions de co2. L’annexe VIII de l’Arrêté du 26 octobre 2010 doit être modifiée pour tenir compte de la modulation carbone de toutes les énergies, dont la prise en compte de la faible émission de l’électricité aujourd’hui et demain.
Cette croissance de plus en plus rapide est directement due aux émissions de gaz carbonique provenant de la combustion du charbon, du gaz et du pétrole… D’après les chercheurs du Global Carbon Project, les émissions liées aux énergies fossiles et à la production de ciment ont atteint 34,7 milliards de tonnes de gaz carbonique en 2011, soit 3% de plus qu’en 2010 et de 54% depuis 1990. La réalité est aujourd’hui dramatique, il est temps pour le gouvernement d’agir…